jeudi 19 septembre 2013

Plus ça change, moins c'est pareil

Dieu que notre industrie a changé en cinq ans.

Oups, désolé, la charte m'oblige sans doute à biffer le mot Dieu. Alors je recommence.

Que notre industrie a changé en cinq ans.

Quand je suis arrivé en poste en 2008...

ACE: Cette bannière purement américaine n'avait aucune vie québécoise, même canadienne il y a cinq ans. On se souvient qu'existait alors Services au détail PRO. Le Roi est mort, vive le nouveau Roi. Le ménage à trois Ace/TimberMarts/Distribution Chalifour semble avoir fait oublier le bon vieux temps de l'époque de Sodisco (pour les plus vieux!). Ça a quand même brassé au fort à Calgary puisque Tim Urquhart a dû quitter la présidence en réaction aux travaux de réflexion stratégique amorcés par le conseil d'administration de TimberMarts.

BMR: Qui pouvait imaginer que des discussions auraient cours avec Unimat en vue d'une éventuelle fusion? C'est pourtant ce qui se passe. À défaut de renseignements officiels, on s'alimente avec les rumeurs, dont la plus répandue veut que le Bureau de la concurrence étudie actuellement les conséquences d'une nouvelle structure pilotée par la Coop fédérée qui coordonnerait les deux bannières (BMR et Unimat), lesquelles resteraient donc bien vivantes. Cohabitation entre une fibre entrepreneuriale pure laine et un empire coopératif: tout semble possible quand une fin justifie de nouveaux moyens.

Canac: Seul groupe non membre de l'AQMAT, il faut quand même souligner un fait ou deux: personne n'aurait pu prédire, sauf les membres de la famille Laberge, que ce groupe typiquement régional sortirait de Québec un jour. La bannière essaime dans toutes les régions, au point où personne ne se surprendrait de la voir s'attaquer à la forteresse montréalaise un jour.

Castle: Au Québec, il y a cinq ans, aucune trace visible de cette bannière bien implantée dans certaines provinces, hormis une collaboration avec le magasin de Jack Crombie à Hudson. Le groupe a pourtant fait des percées ici, timides jugeront ses compétiteurs, mais les moyens sont pris pour que la progression se sente; je pense ici à l'embauche de Robert Legault, au passage au bilinguisme de toutes leurs communications et à une entente originale avec le grand distributeur américain Orgill, lequel, toujours selon les rumeurs, devrait bientôt adhérer à l'AQMAT.

Home Depot: C'est un secret de Polichinelle que son véritable concurrent est Lowe's et personne d'autre. En Afrique, d'ailleurs, on dit que les éléphants ne combattent que les autres éléphants. Or, au moins deux terrains au pourtour de Montréal ont été acquis par Lowe's depuis des années sans qu'on ne voit encore la bannière bleue s'y ériger. Et passons sous silence l'offre de Lowe's sur Rona, officiellement non sollicitée. Le projet a avorté, si bien que Home Depot demeure le seul géant américain en sol québécois, fait unique dans l'ensemble canadien.

Home Hardware: Parmi le lot, c'est sans doute la bannière qui était et demeure semblable en termes de positionnement dans le marché et de modèle d'affaires pour les marchands. La stabilité incarnée par une haute direction non contestée, des marchands conscients et heureux de ce que la bannière peut leur apporter avec un minimum de contraintes. C'est comme si le groupe était imperméable à l'eau qui cascade tout autour.

Patrick Morin: Boulimique, du moins dynamique est ce groupe né dans Lanaudière. La famille ne cache pas son jeu et lorgne trois autres magasins à brève échéance pour atteindre le plateau des 20 enseignes. Elle est bien finie l'épithète d'entreprise régionale quand on constate que ses magasins couvrent déjà trois régions administratives. 

Rona: Avant, Robert Dutton régnait solidement et les marchands Rona étaient à ce point fidèles à la bannière que le simple fait de soulever la possibilité que l'un d'eux puisse considérer l'offre d'un autre groupe déclenchait un regard d’hostilité. Aujourd'hui, l'échiquier a bougé. La toute nouvelle équipe qui occupe la haute direction doit prendre en compte les marchands maintenant regroupés en association pour établir un rapport de force alors que les actionnaires, surtout ceux hors Québec, piaffent d'impatience. Qui peut prédire ce qui arrivera quand on sait qu'avec deux prises, on peut quand même frapper un circuit!

Unimat: Le premier des coups d'éclat des dernières années est venu du joueur le plus traditionnel: la Coop fédérée. Cantonné dans des sous-espaces derrière une priorité agricole, le volet quincaillerie et matériaux n'avait pas vraiment d'existence propre à lui il y a cinq ans. Et voilà qu'on crée Unimat, un branding agressif géré par une équipe aguerrie. Deuxième vague révolutionnaire, l'acceptation depuis 2-3 ans d'opérations de magasins sous un mode non coopératif, c'est-à-dire comme de vraies et entières pme. Et voilà qu'on négocie même avec BMR en vue d'une fusion.

Vraiment, plus ça change, moins c'est pareil!

Vrai aussi pour les personnes. Elles s'adonnent pour la plupart à un grand jeu de chaises musicales, où on change de camp plus que fréquemment, sans pour autant quitter l'univers de la quincaillerie et des matériaux.